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Pascal Mary: un artiste à fleur de peau
« Me v’là enfin bien dans mes traces, avec mes sourires, mes grimaces, me v’là à l’aise dans mes godasses… » chante Pascal Mary au début de son spectacle « Le coeur en tête », créé au festival off d’Avignon, l’été dernier, avec la collaboration artistique de Marina Tomé. Ses godasses, il les a traînées sur toutes les routes de France et de Navarre pour faire entendre ses chansons. Bon nombre d’entre nous ont d’ailleurs croisé son visage souriant à l’entrée des salles parisiennes où il distribue lui-même les flyers de ses concerts. Car cet auteur compositeur est un artisan, un passionné qui n’hésite pas à aller au devant du public. Tendre, tourmenté, volontiers sarcastique, le timbre tour à tour puissant ou caressant, il fait vibrer toutes les cordes sensibles. Qu’il nous invite à partager l’ennui des dimanches de son enfance, s’amuse de tous ces « j’aime » qui fleurissent sur les réseaux sociaux ou confesse son penchant pour la mélancolie et les hommes. On peut préférer son registre plus fantaisiste, comme son tube « Joyeux Noël » (qu’il annonce modestement), dans lequel sa verve et son humour caustique sont impressionnants. "Tout compte fait", Pascal Mary est un artiste à découvrir dans l'intimité de ce piano-voix. Annie Grandjanin
Pascal Mary, comme ils disent
Quinze récitals (des réci-tôts, c’est à 20 heures) à l’Essaïon, face à la tuyauterie de Beaubourg. Ici c’est pas grand mais y’a d’la place. Et c’est toujours plein. Un tour de chant ? Bien plus : un spectacle, un vrai ! De profil vous avez le chanteur au piano. Il ne se fait pas tirer l’oreille pour chanter : mieux il vous la présente, d’une forme si particulière que jadis on l’affubla de tas de noms. Retenons celui de Monsieur Spok, cause à Star Trek. Cause… Il cause aussi. Entre les chansons. Cause toujours tu m’intéresses : là nous sommes captivés, suspendus à ses petites causeries qui sont presque des sketches, drôles, caustiques et croustillants, érudits : il doit s’adresser, je pense, au lecteurs de Téléramacomme à ceux de Science & Vie. Il est de face, les yeux dans les vôtres, dans les nôtres. Dès le début il a fait de vous (de moi, de votre voisin, de ma voisine sans doute aussi) son complice, son confident. Il pourrait se contenter de débiter ses chansons, mais non : il n’est là rien que pour vous, malin, câlin. C’est un enfant terrible au charme et à la manière d’être irrésistibles. Il pourrait vous chanter n’importe quoi. Mais, par politesse, il ne chante que de petites choses qui ont leur importance, des moments de vie, des éclats d’amour, de passions et de ruptures, des bribes d’enfance, des moments de sagesse, de pures folies aussi. Il a une façon passionnante de vous chanter des dimanches ennuyeux, de vous les décrire par le menu, du poulet-frites du midi à la visite au papé l’après-midi :« J’f'rai pas pédé, moi / J’f'rai des p’tits / Pour qu’ils s’emmerdent / Le dimanche après-midi. » Fine écriture, souvent au service des choses et accessoires de l’amour :« Mon stylo quand je l’astique / Il a souvent la larme à l’œil. » Pour la dame de ses pensées ? Que nenni : « La femme, j’ai mis neuf mois pour en sortir / C’est pas pour recommencer… » Et d’enchainer sur ses amants en une chanson de coucheries bien torride, qui en ferait rêver, mais pas tout le monde :« De tous les prétendus baiseurs que j’ai connu / De ce ceux qui vous brassent le cœur et qui assoiffent le cul… » Pour la suite, pris d’une sainte pudeur de puceau effarouché, je vous invite à écouter le disque. On en conclut que Pascal Mary n’a pas fait de p’tits. Le sens de la formule, ai-je dit. Oui, qu’il nous parle des rézosociaux (« J’aime les gens que j’aime… », au fait cliquez j’aime sur cet article, ça lui fera plaisir) ou de sa petite sœur « …qui est dans l’congélateur », vous n’en perdez pas un mot que vous prélevez à sa source, à ses lèvres. Un enfant terrible, dis-je, avec ses vers parfois trempés dans l’acide, le venin, l’eau bénite. Comme avec cet inoxydable, inaltérable tube (rappelons nous que nous sommes en face du Centre Pompidou) sur Noël en famille (encore cette foutue famille, entre église et télévision, dimanches ratés et jours fériés !) où « y’a pas qu’le sapin qu’y a les boules. » Triomphe pour Mary à qui il reste deux représentations pour honorer son contrat. Ensuite, espérez le voir sur les routes, près de chez vous. Au besoin, tannez le cuir de votre organisateur local pour qu’il fasse son boulot, qu’il le programme. Musique : « Tout compte fait » au Théâtre de l’Essaïon, à Paris Charmes, par Difouaine Pascal Mary capte d’emblée la sympathie du public, non comme un enjôleur mais comme un lutin. À l’image de tout le spectacle, son petit mot d’accueil est gracieux et malicieux. Le musicien est heureux d’être là. Moi aussi. La musicalité et la séduction qu’il déploie sont omniprésentes, même dans ses silences ou ses intermèdes parlés, savoureux, gentiment mordants ou coquins. Je suis sous le charme. La voix est suave, très bien timbrée, tenue, sincère. La diction excellente. Les émotions sont variées et le jeu du pianiste s’en font l’écho : les deux mains alternent en un joyeux sautillement de chat, font le pont l’une par-dessus l’autre, sensuelles, ou valsent mélancoliques. Les mélodies, les arrangements et les mots évoquent ceux de Barbara à ses débuts. Loin d’être faciles, ils deviennent toujours ceux que je pressens. Les textes, très personnels pourtant, fleurent bon la tendresse, l’autodérision, la sensualité, un pudique mal de vivre. Je suis émue. La belle voûte de la petite salle du Théâtre de l’Essaïon permet l’intimité et la renforce. L’ambiance était chaleureuse et recueillie. Comme je le remerciais après le spectacle de nous avoir tant donné, Pascal Mary me répondit simplement : « cela se fait à deux. » En plus d’être bon chanteur et bon pianiste (quoi qu’il en dise), cet artiste est aussi une belle âme. Pour ce moment de complicité et de partage rares, je dirais plutôt que le compte est vite fait : merci, encore ! Difouaine « Tout compte fait » de Pascal Mary. Chant et piano : Pascal Mary. Jusqu’au 31 mars 2015, les lundi et mardi à 20 h. Au Théâtre de l’Essaïon, 6, rue Pierre au lard 75004 Paris. Tél. : 01.42.78.46.42. http://www.essaion-theatre.com. Métro : Hôtel de ville
"Georges Sand ma vie son oeuvre", le nouveau spectacle de Caroline Loeb pour lequel j'ai écrit 2 chansons et que vous pouvez découvrir actuellement au Théâtre du Gymnase.... |
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